L'hôtel Jacques coeur occupe une place centrale dans la ville de Bourges. Comme la cathédrale et le palais du duc Jean, il s'appuie sur le rempart gallo-romain qui marque une importante dénivellation. Du côté ouest l'hôtel dominait le paysage et du côté est, l'hôtel se trouve de plain-pied avec la ville haute.
Le Palais Jacques Cour a la forme d'un quadrilatère irrégulier, dont les bâtiments entourent une cour intérieure et présentent leurs deux principales façades extérieures à l'ouest et à l'est.

Les deux façades sont d'un aspect fort différent. A l'ouest, le rempart gallo-romain qui sert de soubassement est bien visible. Il fut d'ailleurs restauré à la fin du XIX siècle. Il est formé de petites pierres cubiques à bandes horizontales de briques et accentue l'aspect militaire donné par les deux anciennes tours.
La tour principale, dite tour de la Chaussée ou tour du trésor, se détache de l'ensemble. Cette tour ronde dans sa partie inférieure et hexagonale dans sa partie supérieure rappelle les tours construites par Guy de Dammartin, l'architecte du duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre.
Le donjon possède un décor abondamment sculpté : balustrade ornée de cours et de coquilles (emblèmes de Jacques Cour), corniches pourvues de gargouilles, personnages sculptés aux angles du premier niveau de la surélévation hexagonale, dont un toit couvrait primitivement les créneaux.
La façade sur rue comporte le grand pavillon central percée par une porte cochère et une porte piétonnière. A son étage, se trouve la chapelle construite à l'identique de celle du château de Mehun-sur-Yèvre, ouvre de Guy de Dammartin.
De la rue, le pavillon central offre la vue d'un balcon couvert d'un dais de pierre flanqué de deux ravissantes fenêtres simulées, où

apparaissent les sculptures d'une femme accoudée à droite, et d'un homme dans la même attitude tourné vers la gauche.
Au-dessus du dais central, le corps du pavillon est percé d'un grand fenestrage dont les sculptures forment deux cours sur lesquels reposent une grande fleur de lys. Une balustrade et un haut toit à lucarne couronnent l'ensemble, qui est flanqué d'une tourelle d'escalier de plan octogonal, abondamment décorée d'une dentelle de pierre. A la base de cette tourelle se trouve une balustrade décoré de coeurs et de coquilles et la célèbre devise : « A vaillans coeurs rien impossible ».
De part et d'autre du pavillon, les façades des deux ailes s'appuient sur des soubassements qui étaient à l'origine percés de petites fenêtres dont on voit le seul exemplaire restant à gauche de la porte piétonnière.
Comme le montre une miniature du livre d'heures de Jacques Coeur conservé à la Bibliothèque de Munich, le dais central abritait une statue équestre de Charles VII, au galop, l'épée levée.
Sous la Révolution, cette statue disparut après que les « Amis de la Liberté » le demandèrent dans une pétition du 15 septembre 1792. Il est probable que les statues de l'homme et de la femme qui ornent les fausses fenêtres, furent, à cette époque, intervertis et qu'à l'origine leurs regards convergeaient vers la statue du roi. Cette supposition est accréditée par le livre d'heures de Jacques Cour. La statue primitive n'est pas sans rappeler celle de Louis XII à la façade est du château de Blois. Ainsi, la façade principale de l'hôtel Jacques-Coeur montre les liens entre le roi, Jacques Coeur, la fleur de lys, le cour et la coquille Saint-Jacques.
La cour intérieure

La cour intérieure frappe par sa beauté et sa diversité. Ces impressions sont encore plus grandes quand on y pénètre par la grande porte et non par l'actuelle entrée des visiteurs. La grande façade du corps de logis attire immédiatement le regard. Trois tourelles d'escalier hors ouvre, ornent la façade.
Celle du centre est décorée sur chacune de ses deux faces par un décor sculpté qui paraît symboliser la torture de Jacques Cour, ainsi que par des arbres tropicaux évoquant peut être les voyages du maître des lieux et les trésors qu'il en rapporta. Au niveau supérieur de cette même tourelle, on peut admirer deux statues dans lesquelles les historiens voient les représentations de Macée de Léodepart, richement vêtue, et Jacques Cour tenant un marteau de maître des monnaies. D'autres personnages figurent également sur cette tourelle : colporteurs, nègre, mendiant, femme portant un pot.
Sur le côté de l'un des décors on peut lire une maxime de l'homme d'affaires et de l'homme d'État qu'était Jacques Coeur : dire, faire, taire.
Le fait que cette tourelle soit aussi richement décorée est l'indication que c'était l'entrée principale du corps de logis.
Sur l'une des deux autres tourelles, celle du nord, ont peut admirer les sculptures de personnages occupés à diverses tâches ménagères : qui à laver un plat, qui à broyer dans un mortier, qui à tourner une broche ou à pendre une marmite à une crémaillère au-dessus d'un feu : c'est donc l'entrée des cuisines.
L'escalier de la chapelle est, quant à lui, décoré de scènes montrant la préparation d'un office. On y voit un enfant de choeur sonnant la cloche, un mendiant s'appuyant sur sa béquille, la sébile à la main, et trois belles dames accourant avec un page, alors qu'au centre on prépare l'autel.
Les autres façades de la cour sont plus simples et moins richement décorées. Celle du pavillon d'entrée ne comporte qu'un fenestrage, identique à celui de la baie sur rue, et un dais de pierre.
De chaque côté, des galeries entourent la cour. Le style de ces galeries couvertes à arcades connut un grand succès dans l'architecture de la fin du Moyen Age et du début de la Renaissance.
L'intérieur du corps de logis ouest : le rez-de-chaussée

La salle des festins se situe au rez-de-chaussée du corps de logis. Elle présente les attributs et caractéristiques d'une salle d'apparat du Moyen Age. Elle occupe toute la largeur du bâtiment et son éclairage est assuré par cinq fenêtres. Son entrée principale communique avec la tourelle centrale, et une seconde entrée extérieure se fait par l'escalier sud. A l'opposé de cette salle, dans un angle, on peut accéder à la tour principale du palais par un escalier.
Les deux autres angles sont occupés par des portes intérieures qui donnent accès aux autres parties du logis.
Avant la seconde guerre mondiale, l'architecte Huignard restaura en grande partie le décor de cette salle. C'est ainsi que la cheminée centrale que le visiteur actuel peut admirer est une reconstitution effectuée sur les bases de sources documentaires. Ces documents apprirent à Huignard qu'une cheminée monumentale se trouvait dans cette salle d'apparat. Le manteau de la cheminée était décoré d'une représentation d'Adam et d'Eve. Tout avait été abattu à une époque inconnue. Grâce à des fouilles effectuées sur le mur intérieur nord, l'architecte retrouva les pieds de la cheminée, ainsi que de rares fragments de son décor originel sous un plancher rajouté. C'est ainsi qu'il mis à jour palmes, morceaux de tourelles, de créneaux, et une main féminine tenant une pomme.
A partir de ces éléments, l'architecte recréa les principaux volumes et une grande partie du décor de la cheminée, à l'exception de la représentation d'Adam et d'Eve, faute de restes suffisants. Il restitua de même une tribune dans l'angle nord ouest de la salle. La représentation admirable des deux cerfs ailés que l'on peut admirer dans l'angle sud-ouest de la salle est également une partie de décor que Huignard découvrit derrière une paroi de planches. Ces éléments sont les vestiges du décor originel et reprennent un thème connu par des tapisseries de l'époque dont l'une était « faicte de cerfs voulans et aux armes du roi, estans au grand ostel ».
Les murs de cette salle portent encore la trace des peintures que les échevins commandèrent à plusieurs reprises à la fin du XVII siècle.
Par contre, un procès-verbal de visite, qui date du 26 Février 1636, nous apprend que cette salle comportait « trente panneaux de vistres, entières et peints, où sont représentés les douze pair (e) s de France et plusieurs roys de la chrestienté, le tout en beau verre peint ». Il n'en reste, malheureusement, aucune autre trace que ces écrits.
Un passe-plat fut mis à jour par Huignard et restitué. En effet, le rez-de-chaussée du corps de logis est également occupé de ce côté par un ensemble de pièces de service. Elles sont desservies par un couloir, qui part de la grande salle, et accessible depuis le grand escalier. On y voit un office, d'où part un escalier qui descend dans une cave située sous le donjon - la cave à vin ?- et ensuite, une cuisine.
Cette cuisine dispose d'un ingénieux système d'étuves situé dans une petite pièce dont la clé de voûte, qui porte les armes de Jacques Coeur et de sa femme, désigne les utilisateurs privilégiés. On peut également y découvrir un cabinet vestiaire construit en échauguette sur la façade ouest.
Le couloir des cuisines mène aussi vers une courette où se trouve un puits. Un autre couloir, occupé actuellement par la billetterie, aboutit à la porte de l'extrémité nord-ouest de la façade sur rue.
Au sud de la salle d'apparat, le corps de logis est occupé par un ensemble de salles desservi par un couloir longeant la façade ouest et par deux escaliers.
La disposition générale de ce rez-de-chaussée du corps de logis est caractéristique de l'architecture médiévale. Les escaliers sur cour ont une fonction d'entrée en plus de leur fonction pratique de montée vers les étages. Chaque entrée possède une fonction qui lui est propre et dont la fonction s'exprime dans la décoration du tympan. Chaque escalier dessert deux salles. La salle d'apparat, quant à elle, est le point central.
Le premier étage et les combles du corps de logis.

Au premier étage, la disposition des salles est sensiblement identique à celle du rez-de-chaussée. On y trouve une grande salle qui est le point central d'une disposition classique de l'architecture médiévale.
La grande salle communique au sud sur un ensemble formant appartement et, au nord, sur trois salles desservies par un couloir disposé du côté Ouest et qui donne aussi accès au donjon par un escalier dérobé.
Le couloir dessert un escalier qui donne accès aux étuves du rez-de-chaussée et à un entresol où se trouve un cabinet et l'emplacement d'une fosse au dessus de laquelle se situe les latrines du premier étage.
Dans le procès-verbal de visite de 1636 on peut lire : « En la grande salle haute s'est trouvé seize panneaux de vistres, où sont représentées les armes de Jacques Coeur et celles où ils avoient pris alliance... En une chambre appelée la chambre des galères, y a six grands panneaux de vistres où sont représentées des galères et navires en peinture fort belle. ». C'est dans cette salle du premier étage que les restaurateurs ont placé le seul panneau conservé représentant une galère, ainsi qu'un bas relief figurant un navire armé navigant toutes voiles dessus.
Les volées de l'escalier central ont été détruites. L'escalier a été partiellement réparé en 1760, mais il ne dessert plus les combles où se trouvent des pièces de service.
Les charpentes de l'édifice, en carène renversée, sont restées intactes. Elles présentent la particularité de ne pas comporter de fermes, remplacées par les chevrons. Les bois qui la composent viennent de la forêt d'Aubigny.
L'intérieur du donjon.
Au premier étage du donjon, se trouve une salle utilisée autrefois comme « petite chambre du conseil ». Les échevins firent orner cette salle par des peintures murales retrouvées en 1938 sous un badigeon. Ces peintures, du peintre Longuet, représentent des scènes champêtres, un arc de triomphe, le cortège de ville et les armoiries des échevins.
Au dessus de la cheminée, une belle sculpture retrouvée en 1893, représente une jeune femme ailée dans un paysage de fleurs tenant une banderole portant la fameuse devise : « a vaillans cuer riens d'impossible ».
Ce motif rappelle le décor de nombreuses tapisseries saisies par les gens de Charles VII.
La salle du troisième niveau, fermée par une porte de fer ancienne, présente à l'une des retombées de la voûte à huit ogives une console sculptée d'une scène étrange : un passage du roman de Tristan, au cours duquel Tristan retrouve Iseult dans un jardin ; l'eau qui y coule reflète le visage du roi Marc qui s'est caché dans un arbre sur la dénonciation de son nain Froncin, de sorte que les deux amants observent la plus grande retenue. Cette pièce, appelée dès le XV siècle « chambre des angelots » à cause, peut-être du décor sculpté des autres consoles, puis « chambre de l'huis de fer » ou « chambre du trésor de la maison de ville », abrita les archives municipales.
L'étage des galeries.
A l'étage de la galerie à arcades nord , se situe une grande pièce, appelée en 1636 « la salle d'hyver ». A l'origine elle communiquait avec le corps de logis. L'étage des autres galeries sert de communication d'apparat entre le Corps de logis et la chapelle. Ces galeries étaient chauffées. Les cheminées de la galerie méridionale comportent encore leurs manteaux sculptés, restaurés par l'architecte Bailly sous le second Empire.
La chapelle

On pénètre dans la chapelle par la travée de la galerie sud, où arrive l'escalier. Le tympan de l'entrée de la chapelle représente une Annonciation.
La chapelle éclairée par deux grands fenestrages est de forme carrée. L'autel se trouvait au dessous de la baie ouest. Deux petites loges sont aménagées dans les murs nord et sud. Chacune est munie d'une cheminée. Ces loges voûtées, qui portent les armes de Jacques Cour et de sa femme, étaient de toute évidence réservées aux maîtres des lieux. On trouve de semblables loges dans la Sainte-Chapelle du duc de Berry ou dans la chapelle Jacques Cour de la cathédrale.
La voûte de la chapelle est particulièrement remarquable. Deux travées divisées en six compartiments par une croisée d'ogive dont les nervures retombent sur des culs-de-lampe portant des écus aux armes de Jacques Coeur et de ses plus proches alliés : sa femme, Trousseau, mari de sa fille Perrette, Jobert et Culon, ses facteurs, ainsi que celles de son ami de Bar.
Dans les douze compartiments de la voûte, vingt anges peints, qui tiennent des banderoles ou sont inscrits des versets du Gloria et du Cantique de Cantiques, complètent la décoration.

Au dessus de l'autel, en 1461, les visiteurs de marques pouvaient admirer « dans un tableau l'argentier au naturel, et dans un autre feu le roi de France et le roi René et beaucoup d'autres seigneurs du royaume » et surtout « le tableau du maître-autel, très joli et peint par un grand maître ».
L'inventaire de 1636 nous révèle enfin que « dans la chapelle ne s'est trouvé aucune chose, sauf un tableau avec sa fermeture, aussi peint par le dedans, qui est devant l'autel de ladite chapelle ».
Les restaurations à l'intérieur de la chapelle furent nombreuses, et notamment celles effectuées au XIX siècle.
En 1865, le peintre Alexandre Denuelle dessine le plafond de la chapelle. Ce dessin, actuellement conservé au musée des Monuments français, nous montre que le bas des voûtains était assez abîmé et que certains anges avaient en partie disparu.
En 1869, Denuelle est chargé de la restauration de toutes les peintures de la chapelle. Une étude récente du Laboratoire de recherche des Monuments historiques montre qu'il « a entièrement repris la voûte, tout en respectant l'esprit des peintures », mais que son travail n'a pas été parfait dans les parties basses des murs.